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LETTRE DE RENTRÉE 2014
DE MGR JACQUES BLAQUART

 
 
Portrait de Mgr Jacques BLANQUART1er septembre 2014
 
Aux prêtres, diacres, consacré(e)s et laïcs engagés dans la vie de notre Eglise,
Et à tous les baptisés catholiques du Loiret.


 
Je vous souhaite à tous une bonne et féconde année pastorale 2014 – 2015, dans la joie de vivre et transmettre l’Evangile autour de vous.
Comme évêque, je me risque à vous écrire cette lettre avec sans doute bien des limites, mais accueillez-la avec le meilleur de vous-même. Je l’ai écrite après avoir beaucoup prié, réfléchi, échangé et demandé à l’Esprit Saint de me guider.
Vous retrouverez certaines convictions que j’ai déjà exprimées, mais cela veut dire combien elles sont importantes pour la vie de notre Eglise diocésaine.

Je vous fais d’abord une proposition : que notre diocèse tout entier (chaque groupe, chaque communauté, paroissiale ou autre) commence l’année par un temps spirituel, une journée de récollection et de prière à l’écoute de la Parole de Dieu, avec un échange autour de la question « Faisons-nous vraiment ce que le Christ attend de nous ? » !

 
Je vous propose une date commune pour cette journée de récollection et de prière :
Le mercredi 1er octobre : fête de la patronne des missions,
Ste Thérèse de l’Enfant Jésus ou à défaut, une date proche.
Cette date du 1er octobre pourrait devenir d’année en année un rendez-vous commun :
« Le Diocèse en prière ».


 
L’exhortation apostolique du Pape François « La joie de l’Evangile » nous appelle avec vigueur à des conversions, à sortir du « on a toujours fait comme ça », de « nos sécurités », de « nos incohérences », à vivre « une nouvelle étape évangélisatrice » et « un renouveau ecclésial qu’on ne peut différer » (§ 34), marqué par « la joie de la rencontre avec le Christ Jésus ».

On me demande parfois : quel est l’objectif de votre diocèse ? Je l’ai dit et le redis ici : c’est l’annonce de l’Evangile ! Notre Eglise vit pour un but précis, celui de conduire à Jésus ceux qui ne le connaissent pas encore (« Viens et tu verras » Jn 1, 46), et de les rassembler autour de lui.

C’est cet objectif qui conduit notre diocèse à être en Démarche Missionnaire (1). L’Evangélisation est notre objectif. Elle n’est pas un gadget pour nous occuper, mais un impératif, un commandement de Dieu. « Malheur à moi si je n’annonce pas l’Evangile ! » s’exclamait Saint Paul. « C’est une nécessité qui m’incombe ! ». Il y a tant de gens à sauver et le Christ compte sur nous : « Allez, je vous envoie… faites des disciples ! »
 
Lors du lancement de la Démarche Missionnaire il y a 2 ans, nous avions proposé à toutes les équipes, d’animation pastorale ou autres, qui le souhaitaient, de répondre à un questionnaire. Il s’agissait de faire un état des lieux de ce qui était vécu localement de la mission (constats) et de proposer des idées réalisables pour l’avenir (projets). Ces constats et projets, rassemblés sur le site internet du diocèse, et donc à la disposition de tous, ont nourri cette année la réflexion du nouveau Conseil Diocésain de la Pastorale.

Ils nous rappellent qu’il y a bien des manières d’annoncer l’Evangile mais que l’Esprit Saint nous pousse toujours à nous convertir et à oser des initiatives. N’ayons pas peur ! Allons-y ! Le diocèse, par le centre de formation (CERC) et par le Conseil Diocésain de Pastorale, se tient prêt à accompagner ceux qui veulent réfléchir et lancer des projets d’évangélisation, même tout simples.

Ce qui nous manque souvent, c’est un esprit de courage et d’audace pour « sortir » de nous-mêmes et de nos habitudes comme nous y invite sans cesse le Pape François. Relisez en particulier les deux premiers chapitres de son exhortation : « La transformation missionnaire de l’Eglise » et « la crise de l’engagement communautaire » !

Nous devons inlassablement revenir aux fondements de la mission chrétienne : l’envoi en mission des disciples dans les Evangiles et les débuts de l’Eglise dans les Actes des Apôtres. Comment une communauté chrétienne, une Eglise, peut naître là où il n’y a rien ? Comment ont fait les Apôtres et les missionnaires dans l’histoire de l’Eglise ? Dans la Lettre Pastorale de Novembre 2011 (2) qui demeure le pilier de mon épiscopat à Orléans, je n’ai fait que reprendre ces fondements de la mission.

I - Pour que nous soyons une Eglise Missionnaire, il faut d’abord LA PRIERE.

La lettre pastorale propose des pistes (temps de prière à chaque réunion, récollection paroissiale, groupe de prière etc.). Des initiatives intéressantes ont été prises ici ou là, mais pas encore partout. Où en est-on réellement de notre pratique de la prière dans les communautés chrétiennes, les groupes, mais aussi dans les familles, et bien sûr pour chacun de nous ?

Le Conseil Diocésain de la Pastorale a travaillé la question cette année, et fait plusieurs propositions (3), comme « mettre davantage de silence dans les célébrations eucharistiques », « faire circuler une « mallette de prière » dans les foyers de la paroisse », « proposer une retraite paroissiale » etc.
La prière doit être personnelle et quotidienne, mais aussi communautaire, vécue avec d’autres. Malheureusement, pour beaucoup, elle peut être réduite à peu de chose. Alors relions-à des attitudes qui lui donnent tout son poids : adoration, silence, gratuité, méditation de la Parole de Dieu, appel à l’Esprit, oraison, louange, durée, fidélité … La prière régulière prépare aux sacrements de l’eucharistie et de la réconciliation, et l’invocation continue de l’Esprit Saint nous rappelle que c’est Lui le principal acteur de la vie de l’Eglise.

Le CERC, les groupes de prière et bien sûr les communautés religieuses de notre diocèse, sont prêts à apporter leur savoir-faire pour une formation à la prière.

II - L’autre fondement d’une Eglise missionnaire, c’est LA VIE FRATERNELLE,
c’est-à-dire l’amour du prochain, la charité du Christ, la solidarité dont parle de manière très claire le Pape François (la joie de l’Evangile § 188 – 189).

Dans notre diocèse, nous avons à vivre 4 réalités essentielles :
 
1- Les 7 pôles missionnaires ont pour but premier d’encourager à la vie fraternelle, notamment les prêtres entre eux et aussi les groupements paroissiaux, pour un élan missionnaire renouvelé.
 
Quand un prêtre est ordonné, il devient membre de l’ordre des prêtres, frère des autres prêtres dans le presbyterium uni à l’évêque. (cf. les lettres d’Ignace d’Antioche). Après un an d’expérimentation, il est bon que, dans chaque pôle, les prêtres réfléchissent à partir de la charte qu’ils ont écrite ensemble : « Que pouvons-nous faire pour améliorer les 3 objectifs fixés : vie fraternelle ? Vie de prière commune ? Partage de la Mission ? » Qu’ils partagent aussi ces questions avec les laïcs, et les laïcs entre eux ! La communion fraternelle entre membres différents de l’Eglise fait signe (Jn 13, 35). « Père, que mes disciples soient un afin que le monde croie » priait Jésus (Jn 17, 21).

2- « N’oublie pas les pauvres ! » Nous devons tous recevoir cet appel du Cardinal Hummes à son ami Bergoglio élu successeur de Pierre, et méditer tout ce que dit le Pape François sur la fraternité avec les pauvres : Il s’agit d’« aller vers eux », de « les écouter », surtout d’« être avec eux », de « les regarder comme visages de Jésus ».

De plus en plus de personnes sont rejetées d’un monde qui broie les plus faibles. Le meilleur PIB d’un pays, et à fortiori le signe d’authenticité d’une communauté chrétienne, c’est la capacité de relation de ses membres, entre eux et avec les plus vulnérables. Le Pape ne cesse de nous interpeller en faveur des personnes en détresse (cf. la joie de l’Evangile § 176 à 258).

Concrètement, tout en rendant grâce pour tous les actes de charité des uns et des autres dans nos communautés, vérifions nos pratiques :
  • Où en sommes-nous de la visite et de la prière pour les malades, toujours liées, pour Jésus et les 1ères communautés chrétiennes, à l’annonce de l’Evangile ?
  • Quelle place habituelle et quelle parole ont les pauvres dans la vie de notre Eglise (par exemple dans nos célébrations) ?
  • Où en est notre investissement personnel et communautaire habituel auprès des personnes et des familles en précarité et souvent marginalisées, que ce soit ici (chômeurs / gitans / migrants / prisonniers / personnes seules / handicapés etc.) et là-bas (populations victimes de la faim, de la guerre, de l’exil…)
  • Y a-t-il un Secours Catholique local ? D’autres organismes caritatifs d’Eglise ? Comment la communauté les soutient-elle ?
Rappelons-nous : la charité n’est pas à option ni l’affaire d’organismes spécialisés. Elle est inscrite dans notre baptême. Il n’y a pas de vie chrétienne sans service du frère dans le besoin. « Parmi les dons de Dieu, la voie supérieure, c’est la charité » (1 co 12, 21).
Ecoutons le Pape (§ 198) : « Dieu s’est fait pauvre pour nous, pour nous enrichir de sa pauvreté. Pour cette raison, je désire une Eglise pauvre pour les pauvres. Ils ont beaucoup à nous enseigner. Il est nécessaire que nous nous laissions évangéliser par eux. La nouvelle évangélisation est une invitation à les mettre au centre du cheminement de l’Eglise… Que dans toutes les communautés chrétiennes, les pauvres se sentent chez eux ! »

3- Créer de petites communautés fraternelles. Ce qui manque dans notre Société hyperindividualisée, où beaucoup de personnes vivent une douloureuse solitude, ce sont des petites fraternités humaines. A fortiori, dans notre Eglise, il est anormal que des frères et soeurs chrétiens, parce que pauvres, soient marginalisés. D’où l’importance de multiplier les Petites Communautés Fraternelles de Foi (PCFF) dont la Lettre Pastorale explique clairement l’objectif et comment y parvenir. Le CERC est prêt à donner des outils aux baptisés qui souhaiteraient lancer ces petites fraternités. Le Conseil Diocésain de Pastorale rappelle quelques initiatives simples à mettre en oeuvre : création de petits groupes temporaires à l’occasion des temps liturgiques (Avent, Carême, temps pascal), réunions de quelques personnes autour d’un Evangile, pouvant aller de pair avec un temps convivial, ouverture du groupe à des personnes hors Eglise etc.

D’autres initiatives nouvelles sont envisagées comme par exemple les cellules paroissiales d’Evangélisation.

Le « coeur » doit donner l’exemple : un an après le changement de mission de plus d’une trentaine de prêtres du diocèse, il est indispensable que chaque groupement paroissial ou communauté locale ait maintenant une EAP (Equipe d’Animation Pastorale), qui se réunisse régulièrement, en prenant un temps substantiel pour la prière et la méditation de la Parole de Dieu. Que dans chaque EAP, il y ait aussi une personne référente pour la charité – solidarité, une autre pour l’annonce de la foi, et une autre pour la prière de la communauté, sans oublier la communication et les affaires économiques.

4. Les visites pastorales que je vais effectuer avec des membres du Conseil Diocésain de Pastorale dans les groupements paroissiaux de notre diocèse seront l’occasion d’expérimenter ensemble cette vie fraternelle, par la prière commune et les échanges, à l’écoute de ce que Dieu attend de nous. Elles visent à encourager les chrétiens et les communautés, même toutes petites, à vivre la joie de l’Evangile.

Résumons-nous :
Notre objectif diocésain, c’est l’Evangélisation ! Pour y parvenir, il y a deux piliers essentiels : la prière et la vie fraternelle, vécue notamment entre prêtres, entre communautés paroissiales, au contact des plus pauvres, dans la création de petits groupes fraternels et par les visites pastorales.

Je laisse le pape François conclure : « Sortons, sortons pour offrir à tous la vie de Jésus-Christ ! Je préfère une Eglise accidentée, blessée et sale pour être sortie par les chemins, plutôt qu’une Eglise malade de la fermeture et du confort de s’accrocher à ses propres sécurités… Si quelque chose doit maintenant nous préoccuper et inquiéter notre conscience, c’est que tant de nos frères vivent sans la force, la lumière et la consolation de l’amitié de Jésus-Christ, sans une communauté de foi qui les accueille, sans un horizon de sens et de vie. Plus que la peur de se tromper, j’espère que nous anime la peur de nous renfermer dans les structures qui nous donnent une fausse protection, dans les normes qui nous transforment en juges implacables, dans les habitudes où nous nous sentons tranquilles, alors que, dehors, il y a une multitude affamée, et Jésus qui nous répète sans arrêt :
« Donnez-leur vous-même à manger » (Mc 6, 37) ». [la joie de l’Evangile § 49]. 
 
+ Jacques BLAQUART
Evêque d’Orléans pour le Loiret

Notes :

(1 et 2) La Lettre Pastorale de novembre 2011 et la feuille de route de la Démarche Missionnaire d’octobre 2012 sont disponibles sur le site internet du diocèse ou sur papier à l’évêché, tout comme cette lettre de rentrée 2014. Merci d’aider à leur diffusion !

(3) L’ensemble des propositions d’actions du Conseil Pastoral est consultable sur http://www.orleans.catholique.fr/demarchemissionnaire